Chaussures

Sorgina, Nadège et Berthoise montrent leurs chaussures









Le thème n'est pas épuisé


Asperges blanches

« Il y a déjà des asperges. Des Landes hein ! pas d’Espagne. Regarde, j’en ai pris un bon kilo » raconte Naroa au retour du marché.
« Bai, tu n’as pas pris les plus petites ! » constate Ttale.
« J’aime mieux les grosses » susurre Naroa avec un sourire tout en approchant du pantalon de Ttale une main au geste sans équivoque. « Les grosses, c’est plus facile à éplucher » complète-t-elle en agitant l’épluche-légumes de sa main libre tandis que Ttale sent son scrotum se serrer de douleur imaginaire.

Principe de précaution

Samedi matin comme déjà depuis quelques samedis et pour encore plusieurs autres, Gexan se rend au groupe médical St Esprit pour confier ses canines à une spécialiste. Ce n’est pas particulièrement douloureux et Gexan apprécie d’être le premier rendez vous de la matinée. Gexan apprécie aussi que la dentiste soit jeune, blonde, sympathique et d’une conversation agréable.


Samedi matin comme déjà depuis quelques samedis et pour encore plusieurs autres, Usoa a toujours les mots qu’il faut, la toison qu’il faut, la douceur qu’il faut pour cueillir Gexan au sortir de la salle de bains et ne pas le laisser partir avec une tension trop vive dans les sacs vers cette spécialiste si jeune, si blonde et si sympathique.

La nuit ne porte pas de nom

Matin de merles qui chantent. Eusebia fait des tartines complexes pour accompagner son café noir. Patxiku laisse son thé fumer en lisant. Il repose son livre pour tremper une galette Maria, « Mais la nuit ne porte pas de nom *» récite-t-il à haute voix.
« Pourtant elle existe notre nuit » complète Eusebia sans cesser de découper géométriquement une tranche de jambon pour la déposer sur sa tartine.
« Et si elle existe, c’est qu’elle a un nom » renchérit Patxiku avec dans un coin de la tête le dicton d’euskadi « tout ce qu’on peut nommer existe ».
« Alors, son nom ? » interroge Eusebia en complétant sa tartine avec un triangle parfaitement isocèle d’ardi gasna.
Patxiku prend une gorgée de thé, se cale sur sa chaise et regarde par la baie vitrée : « un bourgeon dur qui s’épanouit en fleur magnifique, bai, c’est bien ma sensation de cette nuit. La-nuit-bourgeon-fleur-épanouie, tu dis cela comment en euskara ? » propose Patxiku en reprenant une galette Maria.
« Mais … , sourit Eusebia, d’habitude, tu ne manges rien le matin, et là, tu trempes ta deuxième galette ! Alors le nom c'est : la-nuit-deux-Maria ».

* in « où que je sois encore …, Arnaud Maïsetti, Seuil, p 45

Printemps

Premier matin du printemps. Le soleil a décidé d’être de la fête dès ses premiers rayons. Il rend floconneux, duveteux et éblouissant de blancheur, le brouillard dense qui s’accroche encore au dessus de l’Adour. Les bateaux à l’amarre sont presque invisibles au bout des pontons. Itxaro court, petite foulée, le long de la rive droite après le pont St Frédéric.
Retour vers l’appartement. Comme tous les jours Mikel doit encore somnoler au fond du lit. Comme tous les jours, Itxaro se glisse vers la chambre pour hâter le levé par une entrée brutale et vivifiante d’air frais. Mais ce matin la chambre est fraiche, lumineuse et Mikel trône au milieu du lit, le corps recouvert de dizaines de petites pâquerettes. « Joyeux printemps » lance-t-il « J’ai voulu te faire un bouquet mais je n’ai pas trouvé de vase pour de si petites tiges ».
« Elles n’ont pas toutes la même taille, c’est sur, mais j’en vois une pour laquelle je dois pouvoir trouver un vase » sourit Itxaro en se rapprochant.

Malcofada

Théâtre de Bayonne, troisième rang, deux places plein milieu juste à la bonne hauteur pour se noyer complètement dans le dernier chant occitan de la Mal Coiffée, toutes les six à l’extrême bord de la scène, abandonnant micro, percussion, rien d’autre que les voix, les six voix tour à tour qui enroulent, entourent et font se dresser tous les poils des bras de Katisa et Koldo.
« Elles sont fortes quand même, les seules fois où je frémis comme cela, c’est lorsque tu promènes tes cheveux sur mon torse nu » murmure Koldo en remontant l’allée moquettée.
« D’autres femmes qui te font frémir ! Mais je vais les détester » sourit Katisa.

Les alentours du théâtre sont délicieusement vides –la crue de la Nive a fermé le pont Mayou aux voitures- et la nuit de mars parfaitement douce.
« La Mal Coiffée, mais pourquoi elles ont été chercher un nom pareil ? » s’interroge Koldo.
« On est au sortir de l’hiver, il n’y en a peut être aucune des six qui a pris le temps de se faire le maillot » propose Katisa.

Déclaration

Soleil du matin, la journée va être belle.
« Tiens, c’est la première fois que tu me tiens la main sur ce parking en arrivant au boulot » constate Gaxia en serrant un peu plus fort.
« Bai » sourit Xabi « ça va jaser à la machine à café ».
Ils passent la porte d’entrée et au moment de se séparer pour gagner chacun leur étage Xabi murmure : « Mais ne t’inquiète pas, l’excès de tendresse du matin n’empêche pas de se tendre le soir ».

Viens jouer avec Annie

Un jeu proposé par Anne Archet
Avec l'accent d'euskadi


Anticorrida primaire et aficionado décidé
Buveur de patxaran et alcoolique repenti
Curé basque et instituteur laïc
Abertzale radical et CRS casqué
Artiste intermittent et femme politique distribuant des subventions

Bois

« C’est pratique les roulettes ! » Un peu faible la phrase d’accroche. Mais comme la jeune femme blonde qui tire sa valise dans la rue Vasserot lui sourit, Ilixo ne s’en veut finalement pas trop de manquer de répartie spirituelle. Il remonte sur son échafaudage pour finir le dernier m² de peinture sur la façade du garage avec le bruit des roulettes renvoyé par l’étroitesse de la rue. Puis plus de bruit de roulettes. Ilixo jette un coup d’œil « Tiens, elle habite dans l’immeuble qui fait l’angle avec la rue Pellot. » « Ah ez, elle aimerait bien y habiter mais elle n’arrive pas à y rentrer. » « Personne au bout de l’interphone ? » « Le portable, bai, c’est une bonne idée. » « Personne qui répond ? » « Oula, une grosse valise, une porte fermée ! » Ilixo reprend sa peinture comme la jeune femme s’assied sur sa valise devant la porte là-bas.

Voilà. Le dernier coup de rouleau, c’est fait. Ilixo redescend avec le pot et une partie des outils. Le bruit des roulettes, moins vif que tout à l’heure. La jeune femme tire sa valise en redescendant la rue avec l’hésitation de ceux qui ne savent où aller. « Vous pouvez attendre ici, si vous voulez, le temps que je range mon échafaudage, la personne que vous attendez sera arrivée. » Avec sa blouse et ses mains tachées, son rouleau et son pot de peinture, Ilixo ne fait pas vraiment peur.

« Et bien, vous arrivez à rentrer une voiture ? » questionne-t-elle.
« Au début, cela rentrait, mais plus maintenant ».
« Vous êtes sculpteur ? »
« Ez, je ramasse du bois flotté sur la plage, je fais des choses avec mais je n’appellerais pas cela de la sculpture ».

« Il tarde un peu votre ami ».
« J’ai laissé un message ».
« Bai, il va arriver. Ecoutez, je vous laisse la clé, vous n’aurez qu’à la glisser sous la porte quand vous partirez, j’ai un double dans mon appartement plus bas ».
« Milesker ».
Départ. Retour. « Vous avez faim, soif ? »
« Milesker, ne vous dérangez pas ».

Lendemain matin.
« Mais vous avez dormi là … vous avez … mais c’est monumental ce que vous avez fait »
« Oui, excusez moi, j’ai touché à votre bois ».
« Mais ce n‘est pas grave … c’est insensé ce que vous avez réussi à assembler. »
« Ce n’est pas fini en fait. Il n’y avait plus de bois et je me suis endormie. »

« C’est la première fois que je soigne une déception sentimentale avec des bouts de bois » constate Izaga en caressant le baliveau d’Ilixo après une douche, un petit déjeuner et une étreinte parfaitement satisfaisante.
« Tu appelles cela comme tu veux » sourit Ilixo.

Ethiovibre

Ethiopiques. Concert en appartement. Denise et Chris placent haut et fort leur note et la reprennent vivement. Les vieux murs du salon et de la cuisine vibrent de plaisir et renvoient l’écho. Une note aigue parfaitement à la tierce vient se rajouter. Intriguées, Denise et Chris relancent la note, la coupe tout aussi brusquement. L’écho de la vibration revient accompagné de ce plaisant ajout aigu. Troisième essai, troisième accord enrichi. Quatrième essai, quatrième accord enrichi. Magie.

Fin du concert. Xabi et Pantxika remontent la rue Sourrigues.
« J’ai vraiment beaucoup aimé » commence Xabi « mais toi, tu as eu l’air tout chose au milieu du concert, tu n’as pas aimé ? »
« Si, si … mais …, c’est ambigu … j’ai été un peu … comblée et gênée … » répond Pantxika après quelques pas.
« … ? »
« Tu sais, le morceau où elles lancent la note et l’arrêtent d’un coup ? »
« Bai, ça a fait vibrer toute la pièce, c’était super » complète Xabi.
« Cela a fait aussi vibrer les boules de geisha métalliques que tu m’as offertes pour la St Valentin » rougit Pantxika en lui serrant le bras.

Ethiodanse

Sonnerie téléphone :
- Maika Bai ?
- Agur, c’est Pantxika. Alors, ta soirée du festival Ethiopiques, les concerts et spectacles en appartements, tu l’as vu danser tout près le beau Gaël ?
- Bai eta ez, ce n’était pas vraiment comme je le pensais, tu vois, je me disais, une création dans un appartement, il va danser pour moi toute seule dans le salon et après, dans un appartement, la chambre n’est jamais très loin du salon … il y avait des choses à faire.
- Et ?
- Et bien, déjà sur le programme il devait danser rue Bourbaki mais en fait il dansait rue Muscar.
- C’est à coté.
- Bai, mais je suis arrivé la dernière, il n’y avait plus de place dans le salon et j’étais dans le couloir, c’était un peu loin pour accrocher son regard.
- Ce n’est pas grave, il passait 3 fois si j’ai lu le programme.
- Bai, alors à la deuxième séance, premier rang, assise par terre, il ne pouvait pas le rater mon décolleté.
- Et ?
- Il met une telle énergie dans le moindre de ses gestes ! J’étais tout près, je les captais tous les kilowattheures distribués. Et son corps sec, tout en muscles, toujours en mouvement !
- Tu craquais Maika ?
- Complètement. Alors, 3ème séance, même place et un bouton de moins au décolleté. Et il brule, et il se donne, il y a de l’énergie partout, partout. Et quand il finit, je le regarde et je vois qu’il a tout donné, qu’il est vidé et qu’il n’en a plus, lui, de l’énergie.
- Et ?
-Ben, un corps d’homme sans énergie … j’étais moins emballée.

Rendre gorge

« Il faut que tu rencontres amatxi Grazia. C’est un peu plus loin que Baigori, alors on dormira sur place le samedi soir mais je te préviens, on aura 2 chambres séparées. Elle ne plaisante pas amatxi Grazia avec le mariage. Et tu ne lui parles pas politique » avertit Maialen en présentant le programme du weekend.

Lontxo assure bien en tant que futur entrant dans la famille. Il a pensé au petit bouquet de mimosas pour amatxi Grazia, il est drôle sans excès, il mange tout sans discuter et il arrive même à ne pas faire grincer les lames de parquet en rejoignant la chambre de Maialen.

Matin. La langue de Lontxo ouvre, encore une fois, la porte de l’infini. Maialen se rendort presque en même temps qu’elle jouit. Lontxo attend un peu puis se lève sans bruit.

Dans la cuisine, amatxi Grazia lit le supplément télé de Sud Ouest dimanche. En posant un musu sur la joue d’amatxi, Lontxo se rappelle, trop tard, qu’il est encore tout parfumé du miel de Maialen. Un regard.
« Prends toi un bol, je t’apporte le café ». Lontxo obtempère même s’il est plutôt thé le matin. Amatxi le sert jusqu’à raz bord. « Allez, je vais préparer des langues de porc pour Maialen. Elle aime bien quand je lui cuisine avec la sauce gribiche » Amatxi sort un paquet du frigo et en étale le contenu sur une planche à découper pas très loin du bol de Lontxo. « Oh » souffle-t-elle avec un rien de colère « Ce boucher ! Je lui demande des langues et il va me les chercher jusque dans l’estomac. Je ne vais pas lui faire de compliment demain, il y a autant de gorge que de langue. Et bien, les chiens vont se régaler. »
« On peut faire un pâté avec toute cette arrière gorge » s’entend répondre Lontxo avant de réaliser qu’il est en train de donner des conseils à amatxi Grazia dans sa propre cuisine. Un regard. Silence.
« Tu sais faire ça toi, le gars de la côte ? »
Lontxo n’a plus vraiment le choix. Il découpe, hache, oignon, sel, quatre épices. Amatxi revient du jardin avec du laurier. La terrine est dans le four au bain marie.
« Ça fait longtemps que je n’avais pas utilisé cette terrine » constate amatxi « Tu reveux du café ou tu veux aller te débarbouiller avant ? »
Lontxo hésite un instant. « Parce que tu as vraiment besoin d’aller te laver le museau » complète amatxi avec un sourire et des yeux rétrécis.
Lontxo rend sourire et regard : « Je vais reprendre du café avant ».

amatxi : grand-mère