Pleurer mon ange

Ci-dessous, ce n'est vraiment pas un format blog. Et, en plus, ce n'est ni crudité, ni fleur bleue (ou un tout petit peu). Tout au plus un hommage maladroit à Murakami.

Au milieu des phrases magiques de Rilke, de Cendrars, qui flattent mon ego lorsque je veux parler poésie ou simplement passer un moment de quiétude en soirée, se glissent quatre vieilles rimes de Billon et Sardou :

S'il y a des mots qui t'ont fait pleurer mon ange,
Et d'autres qui t'ont révoltée,
S'il y a des idées quelquefois qui dérangent,
J'en ai qui font danser.


Juste ce début de chanson. Après, il y a d’autres rimes sur une mélodie de Revaux qui ne m’est pas particulièrement agréable et sur laquelle je n’ai pas souvenir d’avoir serré très fort des jeunes filles pour cacher mes émois érectiles.
Ces quatre phrases n’ont que peu à voir avec la suite de la chanson, comme si les deux paroliers –ils signent à deux- avaient écrit chacun de leur coté puis rassemblé des morceaux d’histoires séparées. Je ne sais donc pas qui est à l’origine des quatre premières phrases.
La métrique n’est même pas bonne. Pour retomber sur ses pieds au dernier vers, le chanteur doit rajouter de la syllabe : Ouou j'en aiééé qui font danser.
Mais malgré ma capacité à dénigrer les rimes à deux sous d’une chansonnette, malgré ma volonté de demeurer brillant et cultivé, ces quatre phrases, cueillies il y a plus de trente ans, sont installées dans la rubrique « jolies phrases ». Comme je devais en être un peu honteux, elles étaient bien cachées quand même. C’est grâce à toi que je les ai exhumées et, finalement, assumées.

Tu pleurais sans bruit, dans la nuit, dans le lit, tournée de ton coté.
Il y avait surement une raison à tes pleurs. Et, en mon for intérieur, je devais surement trouver cette raison mauvaise, comme toujours, mais le fait était que tu pleurais.
J’ai collé ma poitrine contre ton dos et ma main sur ton sein. Nos peaux se parlaient. Mais ce n’était pas suffisant. Alors j’ai approché mes lèvres de ton oreille. Les mots de Billon et Sardou sont sortis sans que j’en aie vraiment conscience, comme un murmure évident dans l’instant :

S'il y a des mots qui t'ont fait pleurer mon ange,
Et d'autres qui t'ont révoltée,
S'il y a des idées quelquefois qui dérangent,
J'en ai qui font danser.


C’est comme cela que j’ai découvert que je les avais en réserve. Dans l’instant, j’aurais préféré te murmurer du Rilke. Surtout que tu as cessé de pleurer pour me demander « C’est joli, c’est de qui ? ». J’étais vraiment peu fier de t’annoncer un chanteur populaire comme référence. Du coup, tu ne pleurais plus : « Ah bon ? Tu écoutes ça ? ». Tu t’es collée un peu plus contre moi en murmurant : « Tu es humain finalement ».
Tu étais endormie avant que je ne trouve un poème de circonstance plus flatteur.

8 commentaires:

Prax a dit…

J'enchaine les nouvelles de Murakami en ce moment et cela laisse des traces la façon qu'a cet auteur de dire "je" même dans les histoires les plus inventées.

Berthoise a dit…

Je ne t'étonnerai pas en avouant que je ne connais pas Murakami, en revanche quand tu parles de Sardou, je vois.:D

madame de K a dit…

oui mais quand on lit des choses pareilles, on n'a pas envie de laisser un comm... on a envie de partir sur la pointe des pieds pour pas déranger...
;-)

Prax a dit…

berthoise : les nouvelles de Murakami (Haruki), tu peux y aller sans crainte (les nouvelles, hein, les romans je ne m'y suis pas encore lancé)

mme de K : muxu

corinne a dit…

...."lorsque je suis faible c'est alors que je suis fort"...ni fleur bleue ni crudité ..mystique eh!! ..Saint Paul

Christine a dit…

Décidément le hors format vous va comme un gant.
Murakami (un roman, Kafka sur la plage, un truc comme ça) m'est tombé des mains. Je suis trop vieille je crois.

Prax a dit…

corinne : ça met la barre vraiment trop haut

christine : je n'ai pas encore essayé les romans de Murakami, mais dans les formats courts (2 à 10 pages) j'accroche bien.

jalexis a dit…

C'est pour ça que je m'abreuve de variété turque, balkanique et égyptienne....comme ça, j'alimente l'air de rien mon goût caché pour les choses émouvantes, simples et un peu mélo....et en français, l'air de rien, je lis des choses qui on l'air bien...même si je tiens le livre à l'envers, parce que je n'ai pas fini de m'essuyer l'oeil qui coule depuis que j'écoute Sezen Aksu....qu'est-ce qu'il faut pas faire pour avoir l'air de marbre....